le jeudi 16 mars 2017 à 20h au Forum de l’IRTS de Lorraine Le-Ban-Saint-Martin
avec Michel Guérin
Philosophe, Professeur émérite de l’Université Aix-Marseille, membre honoraire de l’Institut universitaire de France.
« L’intime désigne le plus intérieur de l’intérieur. Par rapport à un « dedans », il marque un superlatif, une limite au-delà de laquelle il est impossible d’aller. C’est le propre de ce qui est organique (et non mécanique) que de détenir cette aptitude à séparer la part la plus secrète de soi. C’est d’ailleurs en réservant celle-ci qu’il se recrée à tout instant individu. Il n’y a pas d’individu sans ce quant-à-soi ; il est ontologique avant d’être psychologique.
L’individu est sexe, d’être sexué bien sûr, mais encore et plus radicalement : séparé (sexus, secus, secare ?). Il est l’être qui, pour être inséparable de soi (in-dividu), ne peut pas ne pas être séparé de tout autre. L’épreuve de l’intime – sur fond de pudeur – est l’expérience de ce secret qui, sans doute, ne renferme rien que l’impossibilité de toucher (noli tangere) l’articulation invisible qui lie le Soi à son Individu.
Si la chair se manifeste sur la peau et la pensée par le discours, elles n’en constituent pas moins les deux formes de l’intime, dont le paradoxe est de cacher en pleine lumière, autrement dit de signaler une profondeur d’abysse par la surface même. Ces deux valeurs de l’intime sont-elles irréductibles (nourrissant la vieille dichotomie de la métaphysique) ou au contraire invitent-elles la pensée à rechercher un nœud encore plus intime où elles se joindraient ? »